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A Villey-le-Sec, tant que dure le fort, tant que moutonne la forêt, tant que se causent les humains
[Prises de vue du 2 octobre 2023 / Fuji X100F / Photo brutes]
Villey-le-Sec, j’y ai passé des tas de moments à la fin des années 90 et au début des années 2000. Au fort. Avec un petit groupe de copains qui s’est étoffé au fur et à mesure, on été là les week-ends, notre vie de bénévoles, pour travailler, défricher, mettre en valeur, faire visiter le fort de Villey-le-Sec. Peu de moyens, beaucoup de motivation. Par la suite, l’association a grandi, l’argent des subventions est arrivé, les enjeux ont changé. On s’est moins demandé ce qu’on allait mettre au barbecue pour le midi et on s’est plus inquiété de remplir des dossiers et de travailler son entregents. Ce n’est pas une mauvaise chose en soi, ça profite au patrimoine, et le site a remarquablement évolué depuis. Mais en tous cas ce n’était plus mon truc à moi.
Et puis la notion même de fortification, ce sont des choses qui m’ont toujours parlé, qui m’ont toujours fasciné, qui m’ont toujours rassuré, en un sens. Peut-être comme une sorte de cabane inexpugnable, comme une chambre d’ado, la plus imprenable des forteresses.
Pendant ces années au fort, j’ai appris pas mal de choses, j’ai lié de solides amitiés. J’ai appris une chose essentielle: on peut être ami avec des gens différents, par leurs opinions (je peux te dire que dans le milieu de la «fortif» les gros gauchistes dans mon genre ça court pas les remparts), par leur âge, par leur métier… J’ai traîné avec des agriculteurs, des chasseurs, des ouvriers, des militaires à la retraite ou non. Tout des gens que je n’aurais sûrement pas rencontrés autrement. J’aurais été dans un petit milieu de gens tous pareils que moi et ça aurait été de la merde sans même que je m’en rende compte. J’ai appris qu’on peut parler avec des retraités réacs, être amis, se serrer les coudes alors même que nous sommes des ennemis politiques. Parce que l’idée de s’occuper de notre fort, c’était pas de la politique, c’était l’histoire d’une bande de gens qui s’aiment bien, avant tout.
J’ai appris en ce lieu qu’on pouvait se parler, parfois se prendre la tête: peu importe, on pouvait voir et entendre autre chose que ce qui nous conforte et nous confirme, sans nécessairement varier dans ses convictions: l’humain était finalement la porte d’entrée, et non pas ce qu’il pensait, son camp ou je ne sais quoi d’autre. On peut partager des valeurs quotidiennes de travail et d’entraide, de respect, et être chacun à un bout de l’échiquier, pourtant.
Là, aussi, j’ai appris à aimer une vallée, une rivière, une forêt, et au loin Toul et la ligne sombre des Hauts de Meuse. Mon affection profonde pour ce coin de Lorraine est importante pour moi.
Sûrement que j’idéalise un peu: on s’en fout, l’important c’est ce que j’en retire ici et maintenant.
Il existe aujourd’hui, comme à l’époque, des tonnes de lieux comme ça et c’est rassurant: mais le contexte a changé. Trop souvent les tensions entre les gens sont tellement exacerbées qu’on ne s’écoute pas, on ne s’entend pas, on ne se comprend pas et on ne veut plus se comprendre, on ne veut plus rien vivre ensemble. Alors plus personne n’a le sentiment d’être considéré. Les frustrations s’accumulent et on sait qui récolte les fruits de la frustration: les vautours à la flamme tricolore font des cercles au-dessus de nos têtes, ils attendent le bon moment pour fondre sur le cadavre encore chaud de l’humanisme simple et spontané qui nous lie pourtant inévitablement les un-e-s aux autres. Et les bons maîtres des marchés s’en accommodent très bien.
Vas-y je suis chiant moi ce matin.
Bref, j’aime bien aller à Villey-le-Sec faire le tour du village donc le tour du fort, une douce nostalgie pointe son nez, ça fait du bien, et j’ai une pensée pour tous ces gens de tous âges que j’ai côtoyés ici, et qui m’ont donné à voir, que je n’étais pas seul au monde et que je ne détenais pas plus de vérité ou de vertu qu’eux.
Car comme écrivait Lindingre un jour et comme j’aime à l’écrire à mon tour à toutes les sauces, j’ai beau avoir des convictions profondes, qui ne m’ont jamais quitté et qui j’espère ne me quitteront jamais, c’est bien beau mais une fois qu’on a dit ça, il reste que : «oui, mais il y a les gens».
Et jamais mes convictions, qui me tiennent, me donnent de l’espoir, me structurent, ne devront passer avant les gens.
C’est non négociable.
Ma devise sera toujours: «Oui, mais il y a les gens».
Ou «Peut-être si on fait rien, il se passera rien?», comme disait M. Poulpe dans le rôle du soldat Da Silva.
Je sais pas.
Bon, allez, ta gueule, les photos.





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Le Froidmont y’a longtemps [Bouxières-sous-Froidmont]
Là par exemple je commence à écrire, mais j’ai pas de titre et j’ai pas encore la moindre idée des photos que je vais mettre. C’est un super concept et… et ouais. Ça va vite trouver ses limites en fait. Je vais faire un tour dans mes fichiers et choisir des photos et je reviens.
…
A y est.
[Prises de vue du 21 février 2007 / Canon PowerShot A70 / Photos brutes]
Alors aujourd’hui on va évoquer le Froidmont. Le Froidmont c’est une colline pas très chaude qui… non. Non ça va pas. On reprend.
Le Froidmont c’est une colline comme l’ensemble du relief du Grand Couronné dit de Nancy nous en procure des tas. Techniquement on est même au-dessus de la vallée de la Moselle. Ces collines, souvent, ce sont des raidillons bien coupe-pattes, à mi-hauteur desquels les marnes bloquent l’eau qui s’écoule depuis les calcaires des étages supérieurs et ça fait des sources, merci les marnes, en plus elles font ça bénévolement. Parfois des villages s’installent comme ça au niveau des sources, comme Eulmont, Landremont et autres Machinmont. Parfois non. Et la colline, en fait elle est pas pointue sauf celles qui font leurs malignes comme le Pain de Sucre ou le mont Toulon. Mais en général, au sommet, la colline s’étire en une longue crête souvent forestière comme la Grande Côte au-dessus d’Autreville-sur-Moselle, voire elle te claque carrément un plateau, comme à Malzéville, le plateau star, mais aussi comme au Froidmont.
Voici une série de photos prises sur et depuis le Froidmont qui offre des vues stylées, tellement stylées que l’artillerie allemande, toujours en pointe de la hype, s’y était installée pendant la Première Guerre Mondiale, produisant des ouvrages et des abris, toute blague à part, d’une remarquable qualité.
Les photos, elles, ne sont par contre pas de première qualité: elles ont été faites en 2007 avec mon premier appareil numérique, un Canon A70, petit compact un peu limité, mais robuste et fidèle compagnon pendant quelques années. Je les mets dans ce billet, ces photos, parce que j’aime bien leur ambiance et que c’était ma première rencontre avec ce Froidmont que j’aime. Et la qualité ne remplace pas la beauté, et la beauté se voit avec le cœur, pas avec les…
*bruit de peloton d’exécution*

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Nancy, soir de saint Nicolas
[Prises de vue du 3 décembre 2022 / Photos brutes avec du recadrage pour préserver la dignité / Fuji X100F]
Aahahah. La saint Nicolas. A Nancy. Moi je suis comme tout le monde qui vient des environs et qui a un cerveau, je laisse ma voiture en banlieue, je prends le tram. Bon c’était à l’époque que les moins de deux ans ne peuvent pas connaître car ces temps-ci le tram a été remplacé par des travaux, et les travaux c’est décidément pas des bons modes de transports en commun. Mais les travaux devraient à terme être remplacés par des bus qu’on nous promet encore plus cools que les trams. Qui vivra verra.
En tous cas ce soir de décembre, j’ai déboulé du tram avec des gens pour aller assister au défilé de la saint Nicolas. Alors bon moi les saints hein, on est d’accord, c’est pas mon truc, c’est des gonzes qui ont trouvé comment faire le buzz avant même l’invention de la télé, je leur accorde pas beaucoup plus d’importance qu’à Loana et Jean-Édouard (je n’ai pas rallumé la télé depuis ce sinistre épisode). Ceci posé, je reste un grand fan du Nico. Le Nico de mon enfance, certes, le Nico de ma région, oui, mais surtout le Nico de quand je bossais à Saint-Nicolas-de-Port où j’arrivais en bus juste à l’ouverture de la basilique. Et comme je l’ai toujours trouvée magnifique j’allais toujours y faire un tour, tous les jours, en attendant que ce soit l’heure du boulot. Et j’ai pris l’habitude de causer avec le Nico débonnaire à gauche du transept. Les autres Nico avaient des tronches de mecs sérieux, ça m’allait pas. Bon je lui marmonnait à peu près autant de conneries que j’en écris ici, mais on a fait connaissance et on a bien rigolé dans l’ensemble de mes vannes foireuses et il a été à l’écoute quand je lui ai confié quelques peines et quelques théories qui agitent mon cerveau (par exemple relier le cul des vaches à Mars avec des tuyaux pour y envoyer massivement du méthane qui serait source d’énergie permettrait-il de coloniser Mars et de relancer la sidérurgie lorraine? Car en effet, si on veut pas que les tuyaux se mélangent faudrait des usines à perte de vue pour réaliser un serre-joint géant pour bloquer la rotation de la Terre… je vous passe les nombreuses implications de tout ça). Bref, on est devenus intimes avec le Nico, et j’aime à la saluer dans ses demeures, de la Lorraine au Tréport.
C’est pour ça, pour tout ça que j’aime ce défilé, et ça n’a aucun rapport avec la présence d’enfants dans ma maison et de camarades qui reviennent tous les ans de région parisienne se faire ébouriffer la face par le défilé et ses à-cotés.
Alors j’ai fait mes photos en noir et blanc. C’est une fête colorée. Bon. Pourquoi? Je sais pas vraiment. J’aime bien faire du noir et blanc avec le Fuji. Et c’est rigolo de faire pas de couleur quand le sujet c’est la couleur. Pour faire le malin? J’aurais pu être tenté de profiter du fait que vous n’y connaissez rien et que vous êtes une foule ignare qui m’admire sans discernement pour claquer des tas de photos en noir et blanc complètement floues pour faire l’artiste là comme ça et tout avec des poses genre les mains en cœur, comme si j’étais le DJ de vos vies et que y’avait vraiment trop de love ce soir à Ibiza je vous aime de ouf. Mais non. Je ne les mets pas parce que à tous les coups un-e rabat-joie qui sait faire des photos correctes va commenter: ah ragneugneu c’est juste des photos ratées.Et ça ne serait pas faux.
Alors je fais un vague effort de sélection et je vous mets les moins pires, du moins celles que j’aime bien. Pour sauver mon statut légendaire.
Et que la magie de Noël vous… ah non merde.














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Autour de Thermal [Nancy]
[Prises de vue du 15 juillet 2024 / Fuji X100F / Photo brutes à part du recadrage un peu en scred]
Eh mais mec-euf, j’ai rien foutu depuis avril. Mais alors genre que dalle. Je me suis endormi sur mon clavier après le dernier billet, et pouf voilà je me réveille. Une sacrée sieste. Bon, toujours le même merdier avec Macron et Attal, hein.
Quoi? Le RN a gagné les Européennes?
Quoi? Macron a dissous l’Assemblé?
Quoi? La gauche s’est unie et a gagné les législatives?
Mais alors tout a changé?
Non? C’est toujours le merdier avec Macron et Attal?
Je comprends rien. Je vais me recoucher.
Ah non raté, j’ai été marcher à la place entre midi dans le quartier de Nancy Thermal, près de mon lycée et de mon parc et de mon banc. Je suis vraiment tête en l’air.









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Maxéville, au canal
[Fuji X100F / Prises de vue du 11 mars 2024 / Photos brutes]
Maxéville est une ville qui manque cruellement de monuments de type Taj Mahal et d’immeubles démesurés comme le Burj Khalifa. Voilà pour les points négatifs. En positif on peut dire que Maxéville a un canal plutôt pas mal, avec des rives et de l’eau dedans et des canards en situation de flottaison ce qui répond pas mal au cahier des charges d’un canal. Et moi tu sais j’aime bien me promener au bord des canaux quand ils sont conformes. Alors souvent quand j’ai un peu le temps je m’en vais cheminer, tel un petit cheval blanc qui aurait donc du courage sur le chemin de halage, tous derrière et lui devant. Bon je ne tire pas de péniches parce que je suis trop chétif et que les péniches devenues rares sont plutôt autonomes dans leurs déplacements. Et ce que j’aime bien à Maxéville c’est qu’à un moment y’a de la frontalité, qu’il s’agisse de traces de la vie industrielle passée de la commune ou du joufflu des maisons perchées au-dessus des eaux dormantes. Allez, on va voir ça. Ah oui et j’ai pas raconté trop de conneries aujourd’hui mais si je trouve un jeu de mot médiocre ou quelque chose dans ce goût d’ici la fin de la mise en ligne des photos je te fais signe promis.








Bon bah déso pas déso, j’ai pas trouvé de vannes à faire et en plus faut que je me dépêche je dois aller voir des peintures et tout, on m’attend. Allez, garde la pêche et n’ouvre à personne si ça s’trouve c’est l’diable.
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Nancy ça vaaaaaaa!

[Prises de vue 22 avril 2024 / Fuji X100F / Photos brutes]
Ouais Nancy ça va on s’en sort bien. Autant Nancy peut être une ville riante, belle, dynamique, joyeuse, avec plein de parcs très jolis, de lieux de culture intéressants, d’événements sympas et (plus ou moins) populaires, exceptionnels même, de bâtiments magnifiques du XIVe siècle à nos jours, avec des balades urbaines très chouettes et des banlieues perchées qui ouvrent des vues splendides et attachantes allant jusqu’aux Vosges… autant on ne peut pas réduire Nancy à ça. Ce serait injuste.
Car Nancy c’est aussi, fort heureusement, une ville plombante, grise, minérale, déprimante, triste, moche, glauque, pleine de solitude, de précarité, de choix architecturaux discutables (non je ne pensais pas à la cathédrale mais c’est pas bête du tout), c’est petit sans qu’on puisse en voir le bout, c’est vide et cafardeux. Bref, une ville dont la tristesse nous épargne la gaieté.
On a eu chaud.
Petite série au sortir d’un hiver laborieux qui se prolonge avec toute ma tendre affection. Le printemps attendra, de toute façon j’ai pas trop envie de voir sa gueule à lui. Le plus tard sera le mieux.
NDLR. L’auteur est égocentrique et ne possède pas d’arbres fruitiers.



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Entre Jaillon et Villey-Saint-Etienne, le Terrouin est un p’tit con [janvier 2024]
On est bien d’accord que c’est bien d’interagir avec sa communauté, en tous cas c’est ce que me recommande le tableau de bord du blog. J’ai regardé la date du dernier billet et je me suis dit: bon. Au risque de spammer, je vais refaire un billet de blog. Allez. Le principe de l’interaction, je le précise, c’est je dis des trucs, je mets des photos, vous applaudissez en silence et je fais une sieste pour préparer ma prochaine interaction d’ici quelques mois.

Le Terrouin. Qui fait encore confiance au Terrouin? C’est typiquement le petit ruisseau effronté qui sort de son lit pendant la sieste pour aller faire n’importe quoi derrière ton dos. Ah bah oui y’a plus de jeunesse, dès la petite section ça déconne, c’est la faute aux 35 heures et probablement aussi à Aya Nakamura et à la CGT. D’après une étude.

La blague c’est que tout le monde se laisse avoir. Le Terrouin a une bonne petite gueule et sa vallée est un ravissement de chaque instant. Et pourtant il se disperse le Terrouin. Il part dans tous les sens. A la moindre goutte en trop c’est la Bérézina, il faut dire ce qui est: malgré son âge, le petit Terrouin n’est pas encore propre. Mais ne lui cherchons pas d’excuses.

En réalité, je vais dire tout haut ce que tout le monde pense tout bas: le Terrouin est un petit con. C’EST TOUT.

Après faut voir d’où il vient. Laneuveville-derrière-Foug… voilà tout est dit. TOUT EST DIT. Ne faites pas semblant de ne pas comprendre. Source du Goulot, source de Lucey… fontaine du Pensieux! Voilà, on sait tous ce que ça veut dire. C’est pas source Corinne, quoi, on a compris.

Regarde un peu ce qu’il fait du mobilier urbain… enfin champêtre. BREF. Tu as vu? Des gens font des passerelles? Eh bah lui, ni une ni deux il sabote tout! Il gâche tout! Et il est fier en plus. Si. Ça se voit dans ses yeux. Si. Non mais.

Moi de toute façon je ne sors plus, j’ai peur d’être agressé par un sentiment d’insécurité ressentie. De toute façon ils sont tous pareils. Le Terrouin, le Mâdon, l’Ingressin, même l’Amezule ou la Petite Seille… tous les mêmes. Ah pauvre France. Pauvre Lorraine. Enfin bref, pauvre moi, surtout.

Et le pire c’est que tout le monde s’en fout, à cause de l’hydro-gauchisme. Ça fait du mal. Je passe mes journées à prévenir tous les gens que je croise, ma famille, sur les réseaux sociaux, j’alerte en permanence, je publie des liens sur les inondations sauvages organisées sciemment par les pouvoirs publics pour abattre la France fluviale… en plus je ne m’informe que sur des comptes fiables, la preuve, ils le disent eux-mêmes! Mais je sais pas pourquoi, personne ne m’écoute. C’est comme si je les ennuyais. On m’a dit: t’es gênant. AH-AH! C’est bien la preuve que je gêne, que je dérange, c’est donc qu’il y a anguille sous inondation! Mais ils font mine de rien… alors que c’est la survie des valeurs hydrologiques traditionnallo-éternelles qui est en jeu!

Franchement si ça tenait qu’à moi on ferait interdire l’Anse Insoumise. Regarde-moi le travail. Tout part à vau-l’eau. Vivement qu’on revienne mettre de l’ordre dans tout ça, canaliser les cours d’eau ensauvagés: rives en béton, lit en béton, développement choisi de la faune et de la flore et que ça file droit!
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[Nancy] La rue Marcel Brot, ce truc existentiel
[Fuji X100F/photos brutes]
Alors oui. C’est ça. Bon. La rue Marcel Brot. Pas glamour, hein? L’errance y est donc toute indiquée. Laisse, je vais écrire les trucs d’abord je te mets les photos après. Tu vois le boulevard d’Austrasie? Tu vois Blâmont? Tu vois une France zemmouriste?
Voilà, on a fait le tour de ce qu’on ne veut pas. Après je dis pas, enfin si je l’ai dit, mais errer rue Marcel Brot, errer boulevard d’Austrasie, errer à Blâmont c’est l’occasion de se sentir seul, c’est l’occasion de voir de jolies choses moches pleines de charme laid, c’est l’occasion de rencontrer d’inattendus humains qui ne comprennent pas mieux que toi ce qu’ils foutent là.
(pour la France Zemmouriste, j’arrive pas à trouver de qualités, même cachées, désolé)
Mais pour le moment, où sont les photos?
Bernique! comme disait Jean-Noël Jeanneney dans un élan d’audace un samedi matin radiophonique récent.
Et pourtant si. Les photos. Les voici. Pour toi, public. Pchikrouaf fizz pfff! (c’est le son de la machine à fumée qui lance le show, t’inquiète c’est sous contrôle, on est des pros par ici)





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Infidélité géographique #1: Tout un foin à Domecy-sur-Cure [Yonne]
Avec ce titre je montre ma maîtrise mondiale sur le jeu de mot. Si toi aussi tu veux maîtriser mondialement le jeu de mot, rejoins ma formation 100% GRATUITE pour te faire venir dans la boutique et te faire perdre ta dignité et payer pour me voir être très fier de moi en super capitaliste. Tu vas voir ça vaut le détour. Sinon tu peux aussi aller en Bourgogne, vers Domecy-sur-Cure, et t’émerveiller de comment c’est beau en fait chez l’ennemi bourguignon héréditaire. Bon là c’est surtout du foin mais en vrai c’est cool.



Pour la dernière j’ai collé une photo prise sur une ancienne voie romaine. Juste pour faire mon gars qui a du patrimoine qui claque un peu. La vallée de la Cure, quoi. Testé et approuvé. En passant le chemin éclaté qu’est devenu cette voie doit te permettre de relativiser tous les posts ignares sur les réseaux qui pleurent sur le talent des anciens. Non. Dis-toi bien que les anciens étaient des gros cons comme nous. Voilà. Sur ce, salut la compagnie et viens dans l’Yonne parfois, c’est un bien chouette département.

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Le Faubourg: région Vayringe
Le Faubourg des III Maisons, à Nancy, bien sûr j’ai toujours aimé. Tu crois que je sais pas ce qu’il est convenu ou non d’aimer? Allez. C’est que ça bosse par ici.

Mais t’sais, genre, gros, y’a Faubourg et Faubourg. D’un côté t’as le Faubourg hype, avec ses magasins, sa vie de quartier, sa toxicomanie, son kébab bon (on préférera le dürüm, plus léger, plus pratique, plus bon), sa Mercerie alimentaire (fermée depuis), son coin où laisser le Dâv’ cuire des trucs à manger (fermé depuis), son éphémère caviste Alex faiseur de bouffe attenante (fermé depuis), ses arbres rhabillés pour l’hiver, son épicerie de nuit où on peut trouver de la mauvaise bière tard et à un prix prohibitif, mais quand on aime on ne compte pas, ses habitants variés, ses «bonjour!» dont les rues résonnent plus facilement qu’ailleurs.

Et y’a la banlieue hardcore du Faubourg, la rue Vayringe bébé wsh tu vas faire quoi. Ici, de l’autre côté du canal on a une MJC et une voie ferrée désaffectée, un bistro fermé et un bistro un peu ouvert, du logement social et une chapelle ouvrière, des maraîchers et euh… bah voilà. Et alors quoi?

La rue Vayringe, j’y ai habité, comme j’ai habité avant downtown Faubourg. Bah la rue Vayringe ça a toujours été un peu plus chez moi. Je fais le zouave et tout mais le Faubourg des III Maisons, je l’ai bien aimé. Mais Vayringe, y’avait un gros petit plus. Plus morte, plus joyeuse, plus triste, plus humaine encore, plus en friche, plus calme, moins chère aussi, le loyer ça se paye. C’était ma rue.

La rue Vayringe c’est un peu le jardin des III Maisons, l’arrière-cour, le pré, la remise, là où jouent les gosses et où poussent les carottes sauvages. J’y ai vécu ma plus belle expérience locative à Nancy, expérience variée mais qui n’est jamais tombée très loin de ce Faubourg. Je me suis retrouvé dans un modeste immeuble comme le quartier en compte tant, avec à l’époque des appartements un peu désuets, parfois vétustes. Mais moi dans mon immeuble y’avait au rez-de-chaussée je sais pas qui ça changeait tout le temps, à l’étage c’était nous et un gars folklo à mort mais qui reste une figure mythique, raconter ses aventures délabrées reste un sport que je pratique volontiers, au-dessus, des amis chers, au-dessus encore des amis chers. Que des gens plutôt modestes-mais-ça-va. On était pas mal. Les amis chers avaient des amis chers qui étaient et sont toujours chouettes et nous aussi on avait des amis chers qui étaient chouettes et ça se rencontrait beaucoup, rue Vayringe. Y’avait toujours du monde en plus du monde.

Ça joue, bien sûr, dans mon amour pour Vayringe. Cette vie de communistes de droite. Hop, un immeuble avec une vie collective intense, mais avec chacun son chez soi bien délimité. Je me souviens quand parfois, à l’époque où j’étais au chômage, on descendait dans la cour de trois mètre sur quatre derrière l’immeuble pour jouer aux échecs l’après-midi avec le gars folklo. On buvait des bières et tout mais lui il finissait fin cave vers 15H00 vu qu’il arrivait à 13H00 avec déjà dix bières dans le pif. Bon je perdais souvent quand même vu qu’il jouait tellement bien et moi pas du tout. Après il était pas chiant, il allait juste se coucher et moi je partais raouer des photos dans le quartier. Mon passe-temps.

Parfois ça s’animait le soir, y’avait barbecue dans la cour toute petite, qui était à l’ombre d’un mirabellier qui se trouvait de l’autre côté du grillage, dans le jardin qui était tenu par un genre de petit chef aigri qui n’habitait pas là, mais qui le louait. Un jour il a coupé le mirabellier sans prévenir personne, pas même le propriétaire, parce que ça le faisait chier de s’en occuper. Ça a été un peu beaucoup la guerre, ce mirabellier c’était un bel arbre qui nous faisait de l’ombre et des fruits. On a gagné la guerre parce que son geste a été considéré comme complètement con et illégitime par tout le monde. Y compris le proprio tout colère: on a même gagné l’accès au jardin. Le petit chef aigri a plié bagage. Fallait voir notre joie. Alors on faisait des barbecues, et puis c’était beau au crépuscule le côté cour, toutes lumières et fenêtres ouvertes, des paniers descendant de la vaisselle et des plats et de la bière et du vin depuis les étages, suspendus à des cordes. «J’ai!» braillait-on en bas avant que le panier, vidé, ne remonte vers les hauteurs se remplir dans les appartements respectifs. C’était chouette et plein d’amis chers et d’amis chers d’amis chers.

D’autres fois on prenait tout le bazar et on allait au canal faire notre barbecue. Fallait guetter si l’herbe rabougrie n’avait pas une trop forte teneur en merdes de chiens et bam! On étalait des plaids et tout, et barbecue. Encore. Jusqu’à la nuit. C’était pas si rare qu’on partage une saucisse avec les promeneurs de chiens anonymes qui passaient par là. Une fois on a fêté ici l’obtention de ses papiers avec un ami cher de l’immeuble, longtemps clandestin. On a fêté ça et c’était une jolie bienvenue, moi ça m’a ému. Enfin, les pouvoirs publics et l’horrible Préfecture te reconnaissent le statut d’humain. Nous on le savait de longue date que t’étais un humain, et même un chouette représentant de notre espèce. Mais je sais pas pourquoi, y’a des gens, des États, ils ont besoin de tergiverser des années pour se dire que t’as mérité d’être des nôtres. Ils auraient du nous écouter, on le savait déjà, ça aurait été plus vite. Ouais, on a fêté ça, et pas qu’un peu. Avec la vue sur l’autre rive, le Faubourg et ses richesses, comme son parking par exemple, summum du luxe. Ça vaut une boutique Louis Vuitton. Mais ça brûle moins bien. Le monde est bien fait.

C’était chouette la rue Vayringe. Je ne regrette pas de l’avoir quittée, c’est pas le genre de la maison la nostalgie chiante. Mais ça ne l’empêche pas de me manquer, sainement. De raconter à mes enfants la vie qu’on y avait. de dire que ça a été important pour moi , la rue Vayringe et les centaines d’heures pendant lesquelles je l’ai parcourue, photographiée, sans hésiter, tel un Indiana Jones de la merde de chien, à pousser jusqu’aux communes limitrophes et naturelles, Maxéville et Malzéville.
Et puisqu’on en est à parler de Vayringe et du Faubourg, je m’autorise une pensée émue pour Gérard Trotot, un enfant d’ici, un sacré photographe archiviste précieux de ce quartier, de cette ville et de cette région. J’ai aimé partager des cafés, des souvenirs, des lectures de l’Est avec lui au petit bistro pas toujours fermé. Un chouette gars.
Le quartier ne t’oublie pas. Il ne doit pas.













